Contenu
Dynamiques et enjeux paysagers de la Vallée du Lot
Dynamiques paysagères de la Vallée du Lot
La comparaison des cartes et photos aériennes permet de révéler les évolutions du paysage.
La carte d’Etat-major montre une vallée à l’habitat dispersé, réparti de façon relativement homogène sur l’ensemble du territoire. Les bourgs et villages présentent une silhouette groupée. Des cordons de prairies (vert sombre) accompagnent les ruisseaux. La vallée est entièrement cultivée, les bois (vert clair) y sont rares.
En 1950, la situation semble n’avoir guère changé. L’évolution urbaine reste modérée. La photographie permet toutefois de préciser le parcellaire. L’occupation du sol reste bien différentiée avec un continuum de prairies autour des terres humides près des ruisseaux. Le parcellaire des cultures est extrêmement laniéré, seules les prairies paraissant échapper à ce phénomène. Au sein des champs, de nombreux arbres fruitiers sont disséminés, formant des rangées intercalées dans les cultures.
En 2012, les évolutions sont nombreuses, le paysage a radicalement évolué en 60 ans.
**L’agrandissement du parcellaire agricole
L’évolution du parcellaire agricole est impressionnante. Le parcellaire a été adapté à la culture mécanisée et certaines parcelles atteignent désormais les 5ha. Les cultures ont également évoluées, les prairies sont en régression supplantée par la culture du maïs. Une spécialisation des cultures a eu lieu : les fruitiers ont disparu des parcelles de cultures et occupent désormais des parcelles entièrement dévolues à la production fruitière. Les modes de production des cultures maraîchères et fruitières ont été révolutionnés et le paysage porte la trace de ces évolutions avec l’irruption de matériaux réfléchissants au sein des cultures : tunnels, films plastiques, ombrières…
**L’urbanisation de la vallée
L’extension bâtie a été spectaculaire depuis l’après-guerre. Les bourgs et les villages se sont considérablement développés, s’étalant le long de tous les axes routiers. Le phénomène s’est développé également autour des hameaux qui s’étirent le long des routes. Les bords du Lot sont aujourd’hui de plus en plus urbanisés ce qui contribue à une privatisation des accès à la rivière.
{}
{}
Enjeux paysagers de la Vallée du Lot
**Remettre le Lot au cœur des projets d’aménagements
Contrairement aux autres rivières du département, le Lot est visible en de multiples endroits. Sa divagation en fond de la vallée se perçoit depuis certains coteaux. Des villages offrent une façade sur la rivière, qui donne accès à la rivière et compose avec elle. Des ports, des ouvrages de protection, des embarcadères existent. A Villeneuve-sur-Lot, la rivière passe au cœur de la ville, en contrebas. Les ponts, parfois aux architectures remarquables, offrent des vues sur les perspectives de la rivière. Plusieurs moulins jalonnent le parcours du Lot, avec une chute d’eau attractive. La présence d’un barrage hydraulique révèle la force de la rivière. Mais de nombreux chemins ont disparu et certaines berges se sont refermées sous la végétation. Les confluences avec les cours d’eau affluents restent souvent confidentielles. Ainsi la présence du Lot est bien effective, mais elle pourrait être mieux mise en valeur et valoriser ainsi un potentiel avéré. Il était autrefois un lieu vivant support d’activités (moulins, bateaux, ports). Une stratégie reste à trouver pour redonner au Lot une place et une présence plus importante dans le paysage.
Pistes d’actions envisageables
Donner accès au cours d’eau. Créer ou rouvrir des chemins sur les berges. Retrouver des plages sur la rivière.
Regagner les emprises publiques oubliées le long de l’eau pour créer des chemins.
Gérer la végétation pour voir l’eau, notamment aux abords des villages.
Mettre en valeur le patrimoine lié à l’eau : moulin, port, écluse, chute d’eau.
Révéler les confluences.
Mettre en scène les façades urbaines sur le Lot.
Aménager les espaces publics (place) en relation avec la rivière.
Ouvrir des vues sur la vallée depuis les routes. Mettre en valeur des points de vue sur la vallée depuis les coteaux.
Soigner les abords des ponts (éclaircie de la végétation) qui constituent des points de découverte privilégiés des cours d’eau.
**Maintenir la diversité des paysages agricoles
Le fond de la vallée du Lot présente des tonalités différentes en fonction de la répartition des cultures et de la taille des parcelles. Les parties amont et aval sont plus simples avec des prairies, des vergers ou des grandes cultures. Le paysage tend à se simplifier et à s’ouvrir avec l’agrandissement des parcelles. Les arbres qui les bordent et les ponctuent, animent les vues, apportant un cadre et des repères. La diversité de la taille des parcelles et de l’armature arborée mérite une attention particulière afin de la maintenir et de la renouveler. La partie centrale de la vallée est plus complexe avec des parcelles imbriquées de petites cultures (maraîchage, vergers) mêlées à une urbanisation étalée. L’agriculture devient souvent périurbaine. L’enjeu est pour cette partie de concilier l’activité agricole avec les habitations en termes d’usages et de cohabitation en préservant une multifonctionnalité de l’espace. Certains coteaux, autrefois pâturés ou jardinés, se referment petit à petit par la végétation. Cela tend à uniformiser les perceptions surtout aux abords des villages et à masquer les points de vue. Pour tous ces points, il est important de maintenir un équilibre.
Pistes d’actions envisageables
Préserver et replanter des arbres (haies, arbres isolés, rideaux) pour accompagner le petit parcellaire.
Maintenir ou créer un réseau de chemins agricoles accessibles sans culs de sac, surtout en périphérie des villages.
Inciter à la gestion des coteaux de la vallée pour mettre en valeur le petit parcellaire. Gérer les points de vue en belvédère depuis les coteaux.
Privilégier une diversité des cultures et notamment des cultures spécialisées : vigne, verger, maraîchage.
Privilégier des filets de couleur sombre qui sont plus discrets dans le paysage pour protéger les vergers.
Aménager les abords des exploitations pour en soigner l’image.
Donner à l’agriculture une reconnaissance lui permettant de rivaliser avec la pression foncière urbaine.
Créer des zones de transition entre les parcelles bâties et les terrains agricoles exploités.
Conserver des coupures agricoles entre les bourgs. Limiter le mitage.
**Préserver le patrimoine bâti isolé
De nombreux petits groupes bâtis isolés ponctuent la vallée du Lot. Constitués d’une ferme ou d’une maison de maître ainsi que de leurs annexes (granges, pigeonniers), ils présentent une valeur patrimoniale non négligeable. Parfois de nouveaux bâtiments nécessaires à l’exploitation sont venus s’y accoler en accord ou en rupture avec le bâti existant. De grands arbres accompagnent souvent l’ensemble, venant magnifier les lieux.
Ces petits ensembles, outre leurs qualités architecturales, ont été implantés en adéquation avec leur site et composent avec le paysage environnant. En situation de belvédère, à mi-pente sur un versant ou en fond de vallée, chaque groupe bâti révèle une qualité et une harmonie que l’on rencontre peu dans les constructions récentes disséminées au sein des terres agricoles. Une vigilance s’impose en cas d’adjonction de hangars agricoles dont la facture peut venir banaliser les lieux. La qualité des petits groupes bâtis patrimoniaux mérite donc une grande attention afin d’encourager leur préservation en respectant leur qualité originelle.
Pistes d’actions envisageables
Sensibiliser les propriétaires à l’intérêt du bâti et à la spécificité de leur implantation.
Créer des réseaux pour mutualiser les moyens (aide technique et financière, liens avec les associations, référence d’artisans spécialisés).
Inventorier et réhabiliter le patrimoine isolé : ferme, moulin, pigeonnier, chapelle...
Eviter l’accolement de lotissements ou de pavillons aux fermes ou maisons de maîtres existantes.
Veiller à la cohérence des lots en cas de divisions de propriétés pour favoriser l’intégrité du bâti et son avenir.
Favoriser leur visibilité en évitant l’enfrichement de leurs abords ou des plantations trop denses.
Maintenir ou renouveler les arbres identitaires (cèdres, pins parasols) qui signalent domaines et fermes.
Soigner les adjonctions de bâtiments aux fermes ou maisons de maîtres existantes. Réfléchir à l’implantation et à l’architecture des nouveaux bâtiments agricoles.
**Mettre en valeur les sites urbains singuliers
Les villages et les bourgs de la vallée du Lot se sont implantés sur des sites spécifiques : en rebord de terrasse, au contact de l’eau en pied de coteau, sur des crêtes. Cette diversité alliant large belvédère sur le fond de la vallée ou bien des situations intimes en bord du Lot, représente un atout. Ces villages offrent des formes urbaines et des compositions singulières avec le site environnant. Leur charme unique s’impose toujours. Ces lieux présentent un caractère patrimonial non négligeable, qui mérite d’être largement pris en compte. Ils sont le fruit d’une histoire, et force est de constater que peu d’opérations urbaines actuelles présentent une qualité équivalente. Bien souvent des développements récents sont venus s’y accoler sans tenir compte de la composition urbaine existante et des particularités du site. Il en résulte des assemblages hétéroclites qui font perdre la force des sites en banalisant le paysage. Il est important de continuer à percevoir ce qui fait la singularité des lieux en continuant à révéler l’originalité du site. La structure du village et ses particularités internes, la composition avec le relief, le maintien de belvédères, la gestion de la végétation et de l’espace agricole alentour, ou encore le contact avec le Lot constituent les clés pour faire perdurer ces paysages urbains remarquables. Cela conditionne fortement l’attractivité de ce territoire.
Pistes d’actions envisageables
Mettre en valeur les sites d’implantation des villages et des bourgs : village sur les hauts, au contact des rivières. Révéler les particularités du site (rupture de pente, crête, fond de vallée). Valoriser les éléments singuliers qui donnent au bourg son côté unique (belvédère, place centrale, bord de rivière..).
Respecter l’échelle du village et sa silhouette dans son développement.
Prendre en compte la structure du village et de son site dans les projets d’extension.
Respecter les vues vers les silhouettes des villages en belvédère.
Eviter le mitage des environs du village.
Dégager la végétation aux abords des villages pour conserver leur lisibilité.
Soigner les parcelles agricoles formant l’écrin du village ou du bourg.
Porter une attention particulière aux routes d’accès et aux entrées.
Valoriser le patrimoine bâti (monumental, religieux) et les formes urbaines historiques (bastide, bourg castral).
Renforcer le centre bourg plutôt que d’éparpiller des constructions dans les hameaux.
Restaurer et dynamiser le bâti délaissé dans les centres bourgs. Identifier et promouvoir les bonnes solutions de rénovation.
Conserver l’esprit et l’harmonie des lieux dans les aménagements des espaces publics.
**Maîtriser les extensions villageoises et le mitage
Le couloir de la vallée du Lot, notamment entre Villeneuve-sur-Lot et Sainte-Livrade, a vu une très forte extension de l’urbanisation. L’étalement urbain se prolonge largement sur toute la partie centrale de la vallée avec de nombreux lotissements déconnectés des centres anciens. Les abords des villages et des bourgs ont vu leur physionomie fortement changer. L’urbanisation constitue un élément d’évolution très visible, mais surtout irréversible. Des extensions bâties mal positionnées peuvent altérer la lisibilité de la silhouette du bourg. Elles viennent également combler petit à petit les espaces ouverts de la vallée du Lot. L’urbanisation linéaire et le mitage desservent la qualité des paysages. La façon dont les nouvelles habitations sont organisées entre elles et connectées au reste du bourg conditionne la qualité des lieux. L’idée est de créer de véritables quartiers plutôt que des lotissements stéréotypés sans aucun lien avec la logique urbaine du village. Ce qui fait la particularité du site initial d’implantation (relief, rivière, carrefour, site défensif…) constitue une qualité à mettre en valeur pour que chaque bourg puisse continuer d’affirmer son identité propre. L’adéquation des nouveaux quartiers avec le site constitue un enjeu majeur à prendre en compte pour conserver une harmonie et une cohérence, garants d’une qualité paysagère des lieux.
Pistes d’actions envisageables
Préserver la silhouette groupée des villages. Harmoniser le développement en fonction du relief. Etre vigilant sur l’emplacement, les volumes et les couleurs des nouvelles habitations.
Prôner un développement durable et économe de l’espace dans les documents d’urbanisme. Interdire l’urbanisation linéaire et le mitage.
Dynamiser les centres bourgs pour inciter la restauration des habitations.
Faire évoluer le bâti ancien en centre bourg pour mieux correspondre à la demande actuelle (restructuration d’ilots).
Valoriser les anciennes emprises industrielles en bordure du Lot.
S’inspirer du bâti existant et favoriser l’alignement des façades ou des pignons et la mitoyenneté qui font le charme des centre-bourgs.
Envisager d’autres formes d’urbanisation que le lotissement au profit de quartiers reliés avec le centre bourg. Créer de nouvelles voies et un maillage viaire.
Veiller à l’impact paysager des bâtiments d’activité en périphérie. Requalifier les abords des zones d’activités situées le long des axes départementaux.
Soigner les périphéries des villages : plantations, chemin de tour de village, abords du cimetière...
Préserver les ceintures de cultures diversifiées autour des villages.
Préserver un maillage de chemins autour des villages.
Affirmer les entrées.
**Mettre en valeur les espaces publics
Les espaces publics offrent une découverte du cœur de la cité mais aussi des vues en belvédère (Laparade). Certains centres sont au contact direct du Lot qui constitue un atout indéniable pour des bourgs comme Castelmoron-sur-Lot, Le Temple-sur-Lot, ou encore Villeneuve-sur-Lot. L’entrée et le cheminement jusqu’au centre constituent la première impression. L’entrée dans l’urbanisation forme une transition entre les cultures et un environnement bâti. Elle doit apporter un changement d’échelle après un parcours routier. La route fait place aux rues dont la qualité d’aménagement est importante pour le cadre de vie des habitants. Les espaces publics, comme les places, sont des points stratégiques à soigner pour conserver le cachet du bourg et sa convivialité. Ils ont un fort pouvoir d’attraction pour les nouveaux résidents à venir et l’image de la cité. Dans le bourg la création d’une nouvelle place ou d’une avenue permet d’articuler un nouveau quartier avec l’existant. Les espaces publics sont aussi un formidable vecteur pour relier le village à son entourage par des chemins et des circulations douces (continuité des aménagements à promouvoir). Les aménagements pour améliorer le cadre de vie des habitants doivent conserver une simplicité pour garder l’harmonie et le charme des villages.
Pistes d’actions envisageables
Valoriser les lieux urbains en belvédère.
Valoriser les abords des cours d’eau dans les villages et les bourgs. Soigner l’aménagement des ports et des quais.
Mettre en valeur les places. Trouver un équilibre entre stationnement et convivialité des espaces publics.
Respecter et valoriser le caractère rural des centres des villages. Privilégier des aménagements simples mais de qualité pour les espaces publics.
Réserver les aménagements à caractère urbain pour les bourgs principaux.
Gérer et renouveler les arbres des mails sur les places ou autour des remparts sur les circulations périphériques.
Affirmer l’entrée dans le bourg par des aménagements simples (alignements d’arbres, contre allée, gestion des bas-côtés, réduction de largeur de voirie…).
Prévoir dans toutes extensions urbaines des espaces publics structurants de qualité en lien avec le centre bourg.
**Valoriser les itinéraires routiers et pédestres
Itinéraire majeur de la vallée du Lot, la RD 911/RD 666 suit tout le couloir du fond de la vallée en pied de coteau ou à proximité du Lot. Elle traverse et côtoie bon nombres de villages ou de bourgs. Cette route donne tour à tour des perceptions contrastées sur la vallée du Lot. L’enjeu est de préserver la qualité des perceptions et de maîtriser les abords de la voie, souvent sollicités par un développement urbain. Quelques routes se trouvent en belvédère (RD 233) ou plongent perpendiculairement à la vallée (RD 13), d’autres longent la rivière par endroits. Chaque configuration met en avant des atouts du paysage à soigner (vue, présence de l’eau, basculement du relief). Parfois des alignements de platanes cadrent la perspective, guidant ainsi l’usager et créant une transition avec les champs ou les zones d’activités. Les abords des voies et leur gestion conditionnent les vues et constituent donc un enjeu important. Tout le vocabulaire routier (signalétique, glissières, ouvrages) a également une importance dans la qualité des itinéraires. Les carrefours constituent des moments de réorientation et de ralentissement qui sont aussi des moments de découverte du territoire à soigner. En prolongement des routes la connexion avec des réseaux de chemins apporte autant d’occasion d’arpenter le paysage à une autre vitesse.
Pistes d’actions envisageables
Soigner le paysage perçu depuis les grands axes.
Aménager des aires d’arrêt attractives aux endroits clés du paysage. Les relier à des réseaux de chemins existants.
Aménager les entrées et les traversées de bourg.
Pérenniser et planter des alignements d’arbres sur des itinéraires choisis.
Élaborer des plans de gestion des dépendances vertes et des alignements d’arbres.
Maîtriser l’urbanisation limitrophe de la voie, autour des carrefours ou des échangeurs.
Mettre en scène les itinéraires en fonction des séquences paysagères.
Maintenir ou créer des vues sur le Lot.
Valoriser les événements jalonnant les parcours (pont, point de vue, point de basculement).
Retrouver des réseaux de chemins à des endroits stratégiques pour percevoir le paysage : belvédère, berges du Lot.
Préserver un maillage de chemins autour des villages.
{}
{}
Repères bibliographiques
Paysages
Charte paysagère intercommunale du Grand Villeneuvois, 2014- Communauté d’agglomération du Grand Villeneuvois
Atlas départemental des sites de Lot-et-Garonne, 2010 - DREAL Aquitaine
Diagnostic territorial du PLUI, 2009- Communauté de Communes du Fumélois-Lémance
Paysages de Lot-et-Garonne, 2008, CAUE47
Géographie
Propriété forestière et types forestiers du Lot-et-Garonne, 2014- IFN
Urbanisme et architecture
Guide Paysage et Urbanisation, 2001, DDE47
La vallée du Lot en Lot-et-Garonne : inventaire topographique, 2005- Alain Beschi et Hélène Mousset